"Sans la musique, la vie serait une erreur, une besogne éreintante, un exil " Friedrich Nietzsche (1844-1900) philologue et philosophe allemand.
DU DISQUE EN ÉBONITE DE BERLINER AU CD (COMPACT DISC), EN PASSANT PAR LE DISQUE VINYLE, LE DISQUE REPRÉSENTE À LUI TOUT SEUL UNE PETITE RÉVOLUTION. EN EFFET, CE NOUVEAU PRODUIT DE CONSOMMATION, À L’ORIGINE D’UNE NOUVELLE INDUSTRIE, CONSTITUE UN NOUVEAU MOYEN DE DIFFUSION CULTUREL QUI VA PERMETTRE L’ESSOR DE MOUVEMENTS MUSICAUX ET QUI VA PROFONDÉMENT BOULEVERSER LA SOCIÉTÉ DU XXE SIÈCLE.
LE DISQUE, UNE PETITE RÉVOLUTION
Un nouveau
PRODUIT DEE
CONSOMMATION
1887 : Berliner invente le disque en ébonite, support associé au gramophone, c’est la naissance du disque!
Cette innovation fait dès lors face à une autre invention, le phonographe d’Edison(1877) mais c’est le gramophone qui en 1890 est finalement adopté avec son support le 78 tours utilisé comme format par défaut.
Le disque est une innovation de rupture qui s’est faite suite au progrès technique que constitue la capacité à enregistrer les sons permise par l’invention du gramophone par Berliner qui représente la véritable innovation majeure.
L’invention du disque va opérer à une véritable rupture, un bouleversement au niveau de la consommation de la musique. En effet alors qu’avant la musique était réservée à une certaine élite, avec l’arrivée du disque la musique devient accessible à tous. Bien sur, tout cela ne se fait pas dès 1887 mais petit à petit le disque va passer d’un bien élitiste à un produit de consommation que tous le monde pourra posséder. Ainsi le disque va permettre le développement de la consommation de masse.
Cette innovation entraîne aussi la formation de grappes d’innovation qui visent à améliorer la fonctionnalité du disque et sa technique.
Ainsi, dans les années 1900, le disque se généralise et devient un produit de consommation à part entière. Il s’agit d’un disque de 12 pouces sur lequel l’enregistrement est gravé sur une seule face. En 1905 le disque se modernise, on peut désormais écouter un enregistrement d’une plus longue durée puisqu’il est gravé sur les deux faces. 1915 : Le disque atteint 55 cm de diamètre, il précède le 33 tours, disque microsillon aussi appelé disque vinyle qui apparaît en 1931 et produit un son plus naturel, plus dynamique et plus précis dans les aigus selon la majorité des audiophiles.
En 1983 : nouvelle révolution : c’est la naissance du disque compact dont le succès ne se fait pas attendre : en 1992 les ventes explosent. Il est vrai qu’il présente de nombreux avantages tels que son micro-format, son absence d’usure due à une lecture fréquente ou encore l’accès direct à différents morceaux !
Le disque, produit de consommation à part entière, opérera à une rupture de la consommation et sera en permettant le développement de la consommation de masse vecteur de moyennisation. Mais le disque dont la technique a beaucoup évolué est aussi dès son invention à la base de la naissance d’un nouveau secteur d’activité.
La naissance
D’UNE
INDUSTRIE
1929: Panique pour l'industrie du disque, le chiffre d'affaires des ventes de phonographes est de 6 millions
de dollars, c'est 100 millions de moins qu'en 1922! La cause de cet effondrement des ventes? L'essor de la radio, adversaire d'autant plus redoutable que l'écoute de la musique est gratuite!
1929: Panique pour l'industrie du disque, le chiffre d'affaires des ventes de phonographes est de 6 millions
de dollars, c'est 100 millions de moins qu'en 1922! La cause de cet effondrement des ventes? L'essor de la radio, adversaire d'autant plus redoutable que l'écoute de la musique est gratuite!
En effet, l'industrie du disque connaît des débuts difficiles, elle doit consolider son marché et mettre en place de nouvelles stratégies pour devenir moins vulnérable face à la concurrence. Ainsi entre 1930 et 1940, ce nouveau secteur économique reconstruit le marché du disque grâce à deux phénomènes: une première concentration du secteur et la création du star system. Cette concentration peut être assimilée à un oligopole, c'est à dire que le marché du disque réduit peu à peu le nombre d'offreurs: c'est la création des majors.
Ces grandes entreprises rachètent des labels, les sociétés qui éditent les disques, pour éliminer la concurrence des distributeurs indépendants. Radio Corporation of America, montre l’exemple en 1929 et s’empare de Victor Talking Machine Company, le leader du marché du phonographe, pour former la première major de l’Histoire. Il est suivi de près par Warner, issu d’Hollywood, qui entre les années 1950-60 rachète plusieurs labels indépendants tels que Atlantic ou Elektra et les organise en divisions, ou encore CBS qui met en place son propre réseau de distribution et c’est ainsi qu’en 1970 six grandes majors dominent complètement l’industrie du disque. Il s’agit de CBS, Warner, RCA, MCA, Polygram et EMI. Cette concentration du marché du disque est un succès : on assiste à une explosion des ventes de disque telle, que le chiffre d’affaire de ce secteur s’élève à 7 milliards de dollars en 1978 (chiffre IFPI).
Cette réorganisation s’accompagne d’un phénomène nouveau, le star-system qui se caractérise par une sélection d’un petit nombre d’artiste dont la promotion est faite de façon très offensive afin de faire d’eux de véritables idoles. Cette stratégie montre ses deux principaux avantages : les ventes de disques sont considérables du fait du nouveau statut de l’artiste et les coûts de production des albums sont moindre puisque la maison de disque ne finance qu’un nombre d’artistes restreint. On peut citer comme exemple le titre White Christmas de Bing Crosby sorti fin 1943 qui s’est écoulé à plus de 50 millions d’exemplaires. Il faudra attendre la chanson Candle in the Wind d’Elton John pour obtenir un chiffre de ventes de cette ampleur.
De plus cette réorganisation se traduit aussi par la création massive de nouveaux emplois. La chaîne de valeur évolue, et on observe le schéma suivant, représentant les différents intervenants de l'industrie musicale:
Dans le circuit de production du CD, les artistes doivent passer par un certain nombre d’étapes et d’intermédiaires. Ces intermédiaires prennent chacun un pourcentage du chiffre d’affaire, ainsi pour un CD coûtant 16$ seulement 1$ revint à l’artiste.
Il faut savoir que la fabrication physique d’un CD représente généralement 14% du coût de fabrication total (source Ministère de la Culture et de la Communication, 2000), 13% est dédié au marketing qui comprend les publicités télévisuelles et presse, les évènements promotionnels, la préparation de vidéos et les relations publiques, la production et la distribution quant à elles représentent 21% du coût total, elles impliquent le packaging et le transport entre l’usine de fabrication et le distributeur ou détaillant. Ces coûts élevés s’expliquent par le faible nombre d’usines de fabrication dans le monde et par conséquent des longues distances qui séparent l’usine du distributeur. De plus, la marchandise est souvent exigée dans un délai très court. Les majors, elles, avancent l’argent nécessaire pour le développement des artistes et de leur musique, la production du disque, la préparation et l’organisation des concerts, le merchandising, etc.
Le disque est donc à l’origine d’une nouvelle industrie extrêmement puissante qui se caractérise par des stratégies qui étaient a priori imparables et par une organisation précise.
UNE FORTE INFLUENCE SUR LA SOCIÉTÉ
Un nouveau
MOYEN DE
DIFFUSION
Dans les années 50, l’industrie musicale subit de forts renouveau. En 1948, CBS lance le 33 tour microsillon, appelé à l’époque Long Playing Record (LP).
Un an plus tard, RCA contre-attaque est introduit en janvier le 45 tours. Les 33 tours et 45 tours bénéficient de la concentration des Majors sur quelques styles musicaux, comme les musiques dites « noires », dont le Blues et le Rock’n’roll.
En effet, le rock, musique d’origine afro-américaine issue de divers styles musicaux et commerciaux, se répand depuis le début des années 50.
En effet, le rock, musique d’origine afro-américaine issue de divers styles musicaux et commerciaux, se répand depuis le début des années 50.
À son origine, le rock’n’roll, musique de danse inspirée du rhythm and blues est pratiquée dès la fin des années 1930 par les big bands de jazz de Count Basie ou de Jay Mc Shann, fut popularisé par des artistes noirs comme Chuck Berry et Fats Domino. A partir de 1955, le Rock’n’roll connaît un grand succès aux Etats-Unis, notamment grâce à Elvis Presley, aussi appelé le King, ou encore grâce à Little Richard.
On doit l’apparition du rock à la télévision, au 33 et 45 tours, à la voiture pour tous, et entres autres à l’invention de la guitare électrique par Fender. Cependant l’apparition de labels indépendants, tels qu’Atlantic, en 1948, ou Chess en 1949, et le succès de l’émission de radio Moondog’s rock’n’roll party, animées par le DJ Alan Freed, ont permis la naissance du rock’n’roll et sa diffusion de masse. De plus, le développement des récepteurs radio à transistors a permis aux adolescents blancs d'écouter dans leur chambre, sans que leurs parents soient au courant à cause de la ségrégation raciale, les programmes de radio diffusant de la musique jouée par des artistes noirs.
Des groupes blancs se lancent peut à peu dans le rock’n’roll. Par exemple, le 5 octobre 1962, les Beatles sortent leur premier single : Love me do. Le disque occupe alors la 17ème place du hit-parade, mais quelques mois après, en 1963, il prendra la première place de ce classement. Les disquaires prennent alors la décision de se spécialiser sur la discographie des Beatles, et le label EMI/Parlophone, pour mieux gérer les stocks, propose la pré souscription des albums et des singles, même s’ils ne sont encore que des projets. Les précommandes atteignent alors 2.1 millions pour Cant’ buy me love en 1964.
Des groupes blancs se lancent peut à peu dans le rock’n’roll. Par exemple, le 5 octobre 1962, les Beatles sortent leur premier single : Love me do. Le disque occupe alors la 17ème place du hit-parade, mais quelques mois après, en 1963, il prendra la première place de ce classement. Les disquaires prennent alors la décision de se spécialiser sur la discographie des Beatles, et le label EMI/Parlophone, pour mieux gérer les stocks, propose la pré souscription des albums et des singles, même s’ils ne sont encore que des projets. Les précommandes atteignent alors 2.1 millions pour Cant’ buy me love en 1964.
Quarante ans plus tard, Usher avec son album Confessions, domine le monde, puisque son album a été le plus vendu dans le monde. En France, l’album le plus vendu est celui des Choristes, avec leur célèbre Vois sur ton chemin. Ce style peu connu fera chanter les français pendant plus d’un an et encore aujourd’hui. Ce qui nous laisse penser que les années à venir peuvent encore musicalement nous surprendre, en nous faisant découvrir de nouveaux styles, de nouveaux mouvements.
Une
SOCIÉTÉ
BOULEVERSÉE
Dans son Histoire du Phonographe, Horace Hurm raconte qu’en 1900 il eu la surprise d’entendre des faucheurs chanter Le Coeur des filles du Rhin alors qu’il se promenait à la campagne : c’est grâce au phonographe que ces cultivateurs connaissaient Wagner.
Depuis 1900, la vulgarisation du disque et par lui, la vulgarisation de la musique s’est constamment développée. Le phonographe s’intègre peu à peu au mobilier et il est d’ailleurs inutile d’en posséder un pour évaluer la place du disque dans la société.
Little boy listening to his records on a phonograph.
Photo by Thomas D. MCAVOY
Teenage girl (14-16) on phone, looking at photos, listening to record Photo by Richard Beattle
UNITED STATES - CIRCA 1960s |
Mature couple, Photo by H. Armstrong Roberts, Getty Images
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En 1947, des musiques enregistrées sont diffusées dans les cinémas durant les entractes, dans les magasins on achète chaussettes et brosses à dents au rythme de l’accordéon ou du violoncelle.
En Amérique il y a même des dentistes qui opèrent en musique ou encore des coiffeurs qui utilisent le disque comme stratégie pour attirer des clients. Ils rencontrent cependant un succès modéré.
À Paris, le métro avait adopté le disque pour distraire ses usagers pendant leurs trajets à travers les longs tunnels de Chatelet ou de Bienvenue. Cependant cette sonorisation n’était possible que financée par des réclames publicitaires. Or la loi, à cette époque, a du intervenir pour interdire les publicités sonores sur la voie publique. C’est pourquoi les couloirs du métro sont redevenus silencieux.
C'est pour la même raison qu'en 1939, les publicités sonores dans la rue ont été interdites alors qu’elles commençaient à prendre des proportions inquiétantes.
Cependant, aujourd'hui lorsqu’on entre dans un café c’est encore par un disque qu’on y est accueilli... En 1973, une usine décide même d’utiliser le disque comme fond sonore pour le travail dans le but de créer une meilleure atmosphère, favorable au travail.
Ainsi on peut mesurer l’impact considérable de la généralisation du disque sur la société.
Le disque est un nouveau produit révolutionnaire dans le sens où il a permis aux hommes d’écouter n’importe quelle musique « à la demande », ainsi d’avoir accès à un patrimoine culturel. On retrouve cette valeur sociologique avec l’essor de mouvements musicaux engagés qui influencent la façon de penser et les mœurs de la société. De plus ce produit est important au niveau économique, il a donné naissance à une industrie puissante et à relancé le marché de la musique.